Erdogan avance ses pions : quelle place pour la Turquie au Moyen-Orient ?
Alors que les révolutions arabes plongent le Moyen-Orient dans un état d’incertitude vis-à-vis de l’avenir politique de certains de ses états, la Turquie tente de se frayer une place dans le concert des puissances régionales. Ainsi, Recep Erdogan a débuté hier un voyage diplomatique hautement stratégique qui le mènera dans les pays touchés par le Printemps arabe.
C’est bien ce rôle de puissance diplomatique régionale que souhaite renforcer le Premier ministre turc. La série de visites officielles qu’il a entamées hier est le symbole de sa volonté de compter dans un Moyen-Orient en quête de repères. Lundi en Egypte, il a rencontré les membres du gouvernement provisoire pour parler de l’avenir du pays et évoquer la question palestinienne. Se montrant très ferme, il a plaidé pour la reconnaissance par l’ONU de l’Etat palestinien. Il se rendra successivement en Libye et enTunisie.
Déjà acclamé par la foule hier, le chef du gouvernement turc espère ainsi profiter de son voyage pour asseoir la popularité de son pays dans le monde arabe.
Sa côte de popularité devrait augmenter également grâce à l’attitude ferme adoptée à l’égard d’Israël. En effet, la non-réaction de l’état israélien suite à la parution du rapport Palmer sur l’attaque de la flotille de Gaza( qui avait coûté la vie à 9 turcs en mai 2010) avait conduit à l’expulsion de l’ambassadeur israélien et à la suspension des accords militaires bilatéraux.
Par ailleurs, la position turque avait également évolué récemment vis-à-vis de ses anciens alliés. La condamnation de la répression syrienne est lourde de significations, puisqu’en choisissant de se détacher de Bashar Al-Assad, la Turquie s’est clairement positionnée comme un soutien des révoltes populaires. Apparaître comme l’ennemi des autocraties, telle est la volonté du gouvernement turc. Une stratégie qui pourrait lui permettre de jouer un rôle diplomatique de plus en plus grand dans la région, à l’heure où les occidentaux sont critiqués pour leur attentisme face à ce que certains n’hésitent pas à qualifier de crimes contre l’humanité en Syrie. L’AKP, le parti islamiste modéré au pouvoir en Turquie a une carte à jouer dans la région : servir de modèle et de source d’inspiration pour les peuples soulevés.
En effet, si les révolutions arabes ont été menées par des laïcs, les premières élections libres pourraient donner le pouvoir à des islamistes modérés, qui savent désormais qu’ils peuvent jouer un rôle politique clé.